Continuer à produire des lames haut de gamme, inhérentes à la culture japonaise
2019.09.05
LIFENous avons interrogé M. Yutaka Yazaki, huitième dirigeant d’Ubukeya, maison fondée en 1783, sur le travail de l’affûtage. « Nous avons toujours fonctionné comme ça de génération en génération. Bien entendu, il y a une réalité économique qui demande de travailler sur le plan commercial et de développer le bouche à oreille. Mais fondamentalement, ce qui nous importe, c’est que les outils soient bien utilisés, et c’est pourquoi nous acceptons n’importe quel article provenant d’un autre fabriquant. Nous revendiquons jusqu’à aujourd’hui notre statut d’artisans-marchands, qui englobe à la fois le métier de l’affûtage, et celui de la vente des produits finis. »
Yazaki pense qu’il est essentiel de se rendre sur place. « Je sais que nous sommes actuellement à l’heure d’internet, mais l’idéal c’est de venir au magasin, de regarder et de toucher avant d’acheter. En même temps, quand mon fils me dit qu’il y a des clients qui commandent par téléphone, et que le site internet permet de donner des informations plus détaillées, je sais qu’il a raison. Il faut savoir évoluer avec son époque. »
Le plus important en coutellerie, c’est de pouvoir juger de la qualité du produit. La lame est testée en coupant un cheveu. La façon dont le bord accroche le cheveu reflète la qualité du tranchant. Yazaki poursuit : « La partie fine de la lame est faite pour inciser, et la partie épaisse pour découper. » Cette extrême précision est le fruit d’une longue expérience qui s’est transmise de génération en génération.
Les couteaux de cuisine japonais ont été profondément influencés par le développement des traditions culinaires. « Dès la deuxième moitié du 16ème siècle, on ne fait plus la cuisine avec un seul couteau, mais on voit apparaître des modèles spécialisés, comme le Deba – couteau à lame pointue – qui permet de lever les filets avec une grande précision, le couteau à sashimi, ou encore le couteau à légumes. Cette demande a pour origine le développement des voies artistiques comme la taille des arbres, l’art floral et la cérémonie du thé, qui nécéssitent chacune des lames adaptées. C’est ainsi que les forgerons spécialisés dans les armes se sont reconvertis dans la fabrication de lames à usage domestique. Et la multiplication de ces artisans a entrainé celle des artisans-marchands comme nous. »
Ubukeya, dont la maison principale se situait à Osaka, a donc ouvert une enseigne à Edo – ancienne Tokyo – réputée pour être le plus gros marché au monde de la coutellerie. C’est ainsi que la riche tradition culturelle de Kyoto et d’Osaka a été introduite à Edo et s’y est propagée au sein du peuple. Ce savoir-faire s’est transmis sans faillir jusqu’à aujourd’hui.
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