Toute la profondeur du dessin des blasons familiaux dans un livre
2020.12.28
LIFEDans le « Dictionnaire des blasons » (Mon no Jiten) publié au Japon ce mois de décembre par les éditions Raichōsha, vous trouverez nombre de ces blasons familiaux (kamon) dont les Japonais sont familiers : le lierre, la rose trémière, le papillon, le nuage… toutefois un peu différents de leurs versions habituelles : ils laissent maintenant ressentir un effet de profondeur étonnant, comme si vous touchiez au mystère de l’univers.
Toutes les armoiries ici représentées sont en effet tracées selon une technique unique du nom de « Mon-Mandala® », qui en laissant apparaître toutes les lignes du dessin, nous montre que ces blasons sont avant tout de magnifiques créations de design tout en cercles et en droites.
Les auteurs de cet ouvrage sont Shōryū Hatoba, artisan de la troisième génération maintenant à la tête de la maison Kyōgen, et son fils Yōji. Héritier de la technique des monjō uwaeshi qui dessinaient à la main les blasons familiaux sur les kimono, Shōryū s’est attelé à transmettre ce pan de la culture d’Edo, et c’est en compagnie de Yōji qu’il a introduit dix ans plus tôt les technologies numériques dans son art, donnant naissance à une nouvelle forme d’expression.
« En remplaçant le compas et la règle en bambou par ces outils numériques, le tracé des courbes et des lignes qui n’apparaissait pas dans le dessin à la main est resté affiché à l’écran, formant un joli mandala. »
Le « Mon-Mandala » ainsi obtenu a trouvé des application sur divers supports tels que les œuvres d’art ou les produits. Le voilà maintenant pour la première fois dans un livre qui lui est consacré : ce qui est intéressant, c’est que les armoiries n’y sont pas classées dans l’ordre alphabétique des motifs représentés, mais selon le nombre de traits qui les composent. À mesure que vous tournerez les pages, les dessins deviendront de plus en plus complexes, ce qui vous donnera l’impression exaltante d’être en train d’essayer de déchiffrer un code secret.
« Je n’ai jamais trouvé ça difficile à tracer, même quand les blasons sont compliqués. J’aime vraiment les dessiner. Comme l’a dit un certain Hokusai : “tout se résume à des cercles et une direction”, et je crois qu’une combinaison parfaite de cercles et de lignes peut aboutir à une forme d’expression elle aussi parfaite. »
Dans ce livre, les emblèmes des grands noren suspendus autour du bâtiment Coredo Muromachi de Nihonbashi sont présentés comme des blasons modernes. L’un d’eux, constitué de boîtes pentagonales imbriquées, s’inspire de la position de Nihonbashi comme point de départ de cinq grandes routes. La boîte extérieure adopte la forme du caractère signifiant « entrée », et les cinq à l’intérieur, celle du caractère signifiant « personne » : ensemble, ces deux caractères se lisent ireko, en japonais « objet imbriqué dans un autre de plus grande taille », exprimant l’idée d’« une vie de prospérité pour le plus grand nombre ». De cette manière est intégrée la culture subtile et raffinée d’Edo dans le design.
« Je veille toujours à charger d’un sens profond une forme simple. »
Et c’est cela, le design japonais : exprimer l’essence des choses. Hatoba envisage à présent d’écrire un ouvrage expliquant comment créer des blasons. Nous espérons qu’avec ses livres, il saura faire en sorte que ce sujet fascinant parle à la nouvelle génération et élargira encore un peu plus les possibilités dans ce domaine.
Le dictionnaire des blasons (Mon no jiten)
Texte et illustrations : Shōryū Hatoba et Yōji Hatoba
Éditions Raichōsha
Format poche, 360 pages, 1 650 yen TTC.